Alors... Tans pis pour vous... (rire sadique)
LE CAUCHEMAR DE L'EMIR.
Année 2430. Sur Plophos.
Elle était là, devant lui. Quarante mètres de diamètre pour dix huit de haut. Il émanait d'elle une splendeur et une puissance que seul lui et ses ingénieurs soupçonnaient.
Durant deux longues années, ils avaient travaillé avec acharnement sur le fameux projet. Remettant en cause des choses déjà acquises. Recommençant l'assemblage minutieux et complexe sans jamais se décourager.
L'idée de départ lui était venue sur un simple constat basé sur sa propre mésaventure.
Comme toujours, l'idée la plus simple se devait être la plus réalisable. Il avait connu certes des échecs mais aussi de fort belles réussites. Cet apostolat c'était une fois encore imposé à lui !
Lorsque deux ans auparavant il l'avait soumise, tous furent enthousiastes. Afin de travailler sereinement, le secret fut bien gardé. Et maintenant, dans quelques heures, ses invités arriveraient...
Lui, Mar Aris Kar, plophosien d'origine et ingénieur en chef, venait de réaliser son rêve. Et bientôt le gratin de l'Empire contemplerait son œuvre.
Perry Rhodan, Stellarque de Sol, Atlan l'Arkonide et chef de l'OMU, Roi Danton toujours flanqué de son valet et garde du corps Oro Massut, ainsi que le mulot castor, le lieutenant L'Emir de la milice des mutants. Une fois n'est pas coutume, Iltu, sa ravissante et délicieuse compagne l'accompagnait.
Il attendait dans le hangar F.27 leur arrivée. Fier, il se remémora la genèse...
La gazelle fut agitée de plus en plus souvent de soubresauts. Le propulseur toussait et malgré de multiples interventions continuait de plus belle. Avec quatre de ses congénères, Mar Aris Kar se trouvait fort loin de la première planète hospitalière. Son intercom lançait sans interruption son S.O.S. Un vaisseau finirait bien par l'entendre...
Mais quatre heures plus tard aucune réponse ne parvint.
Toujours agité de convulsions de plus en plus violentes, la positronique conseilla d'une voix froide et impersonnelle un arrêt immédiat du propulseur.
Le plophosien, conscient du danger et voulant éviter une explosion devenue imminente, s'exécuta. La petite gazelle courut dès lors sous une aire de lancé.
Comble de malchance, la positronique rendit l'âme et la lumière fit défaut. Peu fréquent car extrêmement fiable, ce type d'engin ne se trouvait pas à l'abri d'un tel incident. N'en venait-il pas d'en faire la preuve ?
Toujours impassible, ce grand personnage frêle et d'un air benêt, s'assit et attendit. Son message avait été très certainement capté et sa dernière position connue. Deux heures passèrent encore.
L'émergence de l'immense sphère le prit au dépourvu. Ce fut un hasard qu'il ne percute pas la petite gazelle. Le vaisseau Terranien avait surgit à moins de cinq minutes d'eux.
Une demi-heure plus tard, lui et les membres de l'équipage étaient sains et saufs.
Mar Aris Kar resta profondément marqué par cette expérience. Bien que son attitude ne laissa rien transparaître. Depuis, jours et nuits les notions de sécurité l'obsédaient.
Ainsi naquit son projet...
Il sursauta, reprenant conscience du moment présent en entendant une voix pépiante l'apostropher.
- Et bien, ça dort ici ?
Une créature couverte de poils, une queue de castor se balançant de droite à gauche et un sourire narquois
dévoilant une curieuse incisive le fixait intensément. L'Emir ! Se ne pouvait qu'être le mulot castor.
- Pardonnez-moi Lieutenant, je ne vous avais pas entendu arriver.
- Bah ! Normal, je suis le meilleur et le plus silencieux des téléporteurs. Ainsi voilà la cause de notre venue...
- Euh ! Oui Lieutenant. Où sont les autres ?
- Ils arrivent, ne vous inquiétez donc pas. La marche, trop peu pour moi...
Sur cet entre fait, la petite délégation pénétra dans le hangar. L'ingénieur salua les nouveaux arrivants avec beaucoup de déférences, passablement troublé par l'accoutrement et les manières du Roi et cachant une envie de rire bien compréhensible.
Les présentations faites, il se tourna vers ce qui avait motivé ce déplacement des plus hauts représentants de l'Empire.
Ce n'était rien d'autre qu'une gazelle !
L'Emir, toujours curieux, lisait en lui comme à livre ouvert. Il ne prononça cependant pas un mot. Ce dont Rhodan le gratifia d'un clin d'œil.
- Ne vous fiez pas à son aspect Messieurs, cette gazelle en apparence de tout point semblables à celle que nous connaissons est révolutionnaire. Les premiers essais sont concluants. Les tests ultimes seront entrepris demain en votre présence. Nous y reviendrons.
D'un peu plus de trente mètres de long, le nouveau prototype différait extérieurement par deux faits immédiatement visibles. D'une part, au lieu de reposer sur des étançons rétractiles, ce dernier était soutenu en l'air à environ vingt centimètres du sol à l'aide de petits cercles, cinq en tout, disposés sous le ventre.
- Ces petits cercles ne sont autres que des champs répulsifs couplés aux anti-grav. Le circuit est autonome et gérer via la positronique du bord.
- Ingénieux principe, cette idée semble avoir été émise par d'autres si je ne me trompe, lança Danton.
- Affirmatif Monsieur. Nous n'avons rien inventé, juste appliqué et amélioré. Pierre Varin, le terrien fait partie de notre équipe.
- Le voilà qui nous volent nos hommes maintenant ! Grand Seigneur que faites-vous donc pour empêcher un tel exode ?
- Ne défaillez pas de suite Roi, attendez la suite, répliqua amusé Atlan. Rhodan se contentait toujours de sourire. Mar Aris Kar continua :
- La protubérance centrale que vous observé sous la gazelle a nécessité plus de travail. Là réside la véritable révolution. Pour la comprendre il nous faut pénétrer à l'intérieur.
Cette gibbosité ventrale, de dimension respectable, huit mètres sur cinq et d'une profondeur de quatre mètres donnait un aspect singulier à l'ensemble et était la deuxième différence notable visible.
A l'intérieur, Rhodan, Atlan et les autres furent agréablement surpris. Tout avait été repensé.
Des fauteuils contours plus minces et nettement plus confortables s'affichaient près d'un tableau de bord entièrement remanié lui aussi
- Votre planète de diamant m'a fourni les techniciens pour la confection Monsieur Danton. L'ingénieur en chef utilisait avec beaucoup de malice ses apartés.
- Que disiez-vous sur l'exil des Terriens, mon bon Sir ? S'amusa le premier Terranien.
- Oro, mes sels, je ne pourrais en supporter plus ! Le nom des traîtres et vite que je les fasse décapiter...
- Ce qui ne risque guère de vous arrivez, ne l'avez-vous pas perdu depuis des lustres, en rajouta l'Emir.
- Rat de malheur ! Parlez ainsi de ma royale majesté...
Revenant sur le tableau de bord, Atlan se montra vivement intéressé.
Il constata d'abord les innovations non révolutionnaires mais essentiellement pratiques de l'ensemble. Exit leviers, boutons ou interrupteurs divers, des touches sensitives parsemaient le comptoir. Le plophosien, fier de cette attention continua révélant avec parcimonie les nouveautés agrémentant la corvette.
- Ces écrans sont plus sensibles et possèdent une très haute définition, Lord Amiral. En outre, un système de double caméra couvre les trois cent soixante degrés de l'espace visible extérieur. Chacun des cadres figurants sur cet écran particulier correspond à un angle de vue diffèrent.
- Un seul écran pour embrasser un ensemble ! Ingénieux. Je dois en convenir. A force de forcer une technologie, nous en oublions l'essentiel. Le sens pratique.
Sur le pourtour du poste central des volets étaient disposés avec beaucoup d'attention et de soin. Les relevants, des placards se découvraient. La particularité résidait uniquement sur le côté levant vers le haut de ces volets de fermetures.
Mais l'innovation qu'attendaient tous se trouvait dans la soute abritant le système de propulsion et le propulseur lui-même ! Et la surprise fut de taille.
Mar Aris Kar avait manifestement ménagé ces effets. A la place d'un bloc massif et anachronique, une masse cubique trônait.
Un propulseur réduit d'un tiers environ, mais doté des mêmes capacités et caractéristiques que son cousin d'antan. De petits cubes métalliques, flanqués de multiples trous, regroupaient différentes connections ou des prises spécifiques se logeaient.
Débranchant habillement plusieurs liaisons, l'ingénieur en chef se dirigea ensuite vers un petit réduit et manœuvra deux ou trois connections. Un claquement sec se fit entendre, puis le propulseur en place se mit à tourner sur lui-même, libérant un second du même type. Lentement, mais avec une précision diabolique, ce dernier se mit en place. Il rebrancha les diverses prises. La gibbosité extérieure venait de livrer son secret. L'ensemble de la manœuvre ne prit guère plus d'une demi-heure. Les contrôles de routine devaient en prendre autant. Ainsi, le système ingénieux et simple d'apparence impliquait une mise en place d'une heure maximum !
- C'est cela qui nous a amené à repenser l'intérieur de la gazelle. Afin de conserver un centre de gravité stable. Il n'y avait là rien de bien sorcier Messieurs. La technologie existait, nous n'avons finalement eu qu'à l'appliquer avec plus de rigueur peut-être.
- Le résultat est stupéfiant Mar Aris Kar. Pourrions-nous savoir d'où vous est venue une telle idée ?
Sans se faire prier il narra sa mésaventure puis détailla le cheminement de son idée.
« Nous savons tous que le stockage d'un moteur de rechange à bord d'une simple gazelle est impossible à cause de la place que cela prendrait. En outre, il est évident que son changement est impensable dans l'espace. L'autonomie est réduite, à peine quelques heures dans ce type d'engin. Même avec l'aide de robots spécialisés ! A moins de pouvoir effectuer un atterrissage d'urgence. Ce qui est loin d'être systématique vous en conviendrez.
Augmentez la puissance de la gazelle ? Donc nouveaux propulseurs nettement plus puissants. Ce concept nous l'avons grâce aux corvettes. Or les gazelles trouvent leurs utilités pour des missions de reconnaissances rapides, des infiltrations diverses voir des appuis logistiques.
Il nous fallait un système suffisamment souple et rapide permettant un échange efficace dans un cadre de circonstances extrêmes mais existantes. La sécurité veut un tel sacrifice !
C'était mon idée de départ Messieurs, je pense qu'elle vaut le sacrifice de quelques solars.
- Et vous semblez y avoir fort bien réussi. Bravo monsieur Aris Kar, et féliciter vos collègues de notre part.
- J'ai omis de vous dire que nous avons opté également pour la mise en place d'une balise de détresse autonome, branchée sur pile atomique. Le repérage se trouve sécurisé et plus rapide.
La visite dura près de quatre heures. Sortant de la gazelle « new génération » l'Amiral s'enquit :
- Quel nom de baptême avez-vous donné à cette merveille ? Dit-il innocemment.
- J'ai prié Monsieur le Stellarque d'y pourvoir.
- As-tu choisi Perry ?
- Peut-être, lança t- il mystérieux.
Le mulot castor tenta vainement de lire en son esprit. Mais le barrage mental de ce dernier était bel et bien hermétique.
- Un grand nom serait le bienvenu Grand Seigneur
- Le chiffon ambulant à des vues, ironisa l'Emir.
- La peluche à pattes n'en aurait aucune envie, rajouta implicitement Atlan
- Ne prenez pas garde mon Sir, intervint Oro, l'éducation des souris a toujours laissé à désirer.
Oro Massut se retrouva in petto en l'air, tête la première vers le sol. Un éclat de rire venant ponctuer une visite enrichissante au demeurant. L'ingénieur en chef, loin d'être en reste, joignit le sien.