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[Zénon, suite]Pour le singe, le degré de complexité où se situe la solution est comme s'il n'existait pas. Il lui est irrémédiablement inaccessible. Nous savons pourquoi: c'est que les centres d'intégration cérébraux du singe (le réseau neuronique de ses lobes frontaux) ne sont pas plus capables d'élaborer les modèles d'activités requis par le problème que la machine additionneuse d'un self-service ne peut calculer une dérivée. Il ne s'agit pas de "sottise», mais bien d'impossibilité.
Nous disions plus haut que cette limitation psychique d'espèce est un fait universel dans la vie terrestre: c'est ainsi, par l'inlassable affrontement de tous ces psychismes limités, que là vie s'est développée sur notre planète jusqu'à l'homme inclusivement.
Cela, les savants le savent. Ils le tiennent, et toute leur science le leur montre, pour un fait d'une évidence tout à fait grossière.
La relation de cette limitation psychique d'espèce à la complexité du système nerveux est parfaitement démontrée elle aussi, même si elle n'est que partiellement explorée. Martin Wells a pu, par exemple, réduire progressivement les performances psychiques des céphalopodes qu'il étudie dans son laboratoire du Churchill College de Cambridge en paralysant électivement leurs centres intégrateurs, l'un après l'autre, en commençant par les plus complexes, c'est-à-dire en remontant leur ordre d'apparition paléontologique depuis les plus récents jusqu'aux plus primitifs. La pathologie du cerveau humain montre la même régression de notre psychisme, suivant que les lésions détruisent telle ou telle partie plus ou moins ancienne du cerveau. Il s'agit d'un fait universellement attesté dans la vie terrestre.
Rien certes ne nous interdit, au nom du principe de Kelvin, d'affirmer que cette limitation psychique d'espèce, universellement attestée jusqu'à l'homme, cesse miraculeusement de s'appliquer à l'homme lui-même'
Du fait que l'homme est l'être le plus évolué de cette planète, aucun être connu ne peut le mettre dans la situation que connaît le singe de laboratoire par rapport à l'expérimentateur Cole. Il peut donc impunément déclarer qu'aucune pensée ne saurait lui poser des problèmes irrémédiablement insolubles par le jeu de sa propre pensée. Non seulement il le peut, mais son expérience terrestre tout entière vient confirmer cette opinion, et pour cause, puisqu'il ne saurait, étant le plus évolué, rencontrer jamais sur Terre un être qui le dépasse.
Remarquons que le primate tertiaire d'où est sortie la lignée de l'Homo sapiens pouvait en dire autant. Lui qui ne savait ni maîtriser le feu, ni fabriquer un outil, ni compter les jours de sa vie, ni comprendre que, quand il couvrait sa femelle, celle-ci s'en trouvait fécondée, lui aussi disposait d'une pensée qui pouvait, sans craindre un démenti, se déclarer l'achèvement de toute pensée, puisqu'elle était la plus évoluée de toute la planète.
Deux petits millions d'années ont passé, et si Cole rencontrait ce roi de la création, il se hâterait de lui installer une cage dans son laboratoire pour lui poser des problèmes insolubles. Insolubles pour ce roi dépassé. Pas pour nous qui nous croyons indépassables.
Qu'est-ce qui autorise le primate quaternaire, réfutateur des soucoupes volantes, à revendiquer la définitive suprématie intellectuelle, que le primate tertiaire pouvait revendiquer déjà, mais à tort, quoiqu'aussi persuadé que nous d'avoir raison, et pour des raisons identiques? Je ne sais. Mais enfin, nos sages quaternaires proclament que l'hypothèse même d'une pensée aussi impénétrable à la leur que la leur l'est à celle du singe est absurde et aberrante. Je défère à leur démonstration: vous dites qu'il est "irrationnel" d'admettre la possibilité d'êtres dont les capacités psychiques, les mobiles et les techniques seraient incompréhensibles à l'homme. Comme la présence de tels êtres dans l'environnement terrestre supposerait précisément la réalité de ces techniques incompréhensibles (puisque vous avez de la même façon démontré l'impossibilité d'une telle présence), il s'ensuit que si, malgré votre démonstration, la Terre était visitée par une pensée extraterrestre, ce ne pourrait être que celle d'un être avec qui nos seuls rapports seraient ceux que le singe entretient avec Cole.
Je ne dis pas que la Terre est visitée par une telle pensée. Je dis seulement, en me fondant sur votre démonstration, que si cette visite était prouvée par l'observation (qui seule peut pourvoir une connaissance positive), la pensée de notre visiteur ne pourrait pas plus se réduire à la nôtre que sa technique à nos fusées. Tant plus sa présence sur nos têtes contredirait notre science, tant plus sa pensée dominerait la nôtre.
Certes, le contact est possible entre Cole et son singe. Il est possible moyennant une cage. Il est bilatéral au niveau du singe, c'est à dire que l'homme, moyennant une étude pleine de pièges et de difficultés, peut à la limite échanger avec le singe toutes les "idées" de singe (7). Mais cet échange est unilatéral au niveau de l'homme qui ne peut expliquer au singe ni ce que lui, l'homme, fait, ni pourquoi ni comment il le fait. Les expériences de Jane Van Lawick Goodall en particulier montrent que le contact ne s'établit que par un apprivoisement débouchant sur la domestication s'il ne respecte pas les limites psychiques de l'animal.
Appliqué à l'homme, un dispositif de ce genre aboutirait promptement à le déshumaniser, puisque notre espèce tient toute sa dignité de son histoire non domestiquée, et que l'histoire est née de notre effort en face de l'inconnu et de l'adversité.
A quoi servirait notre pensée, si une communication avec une source inépuisable de connaissance venait à lui épargner soudain tout effort et toute recherche? La condition humaine adulte est-elle compatible avec une régression à la dépendance infantile? La pensée adulte n'est elle pas, au contraire, par définition, une pensée non dépendante?
Si nous suivons jusqu'au bout le principe de banalité, la condition humaine doit être considérée comme un simple moment particulier de toute pensée, d'un bout à l'autre de l'univers, à savoir le moment où chaque pensée planétaire découvre l'immensité de l'espace sans avoir encore acquis la possibilité d'y accéder.
Une foule, peut-être une infinité d'espèces, doivent en être là dans l'univers infini.
Et les espèces (si elles existent) qui ont dépassé ce stade doivent avoir une éthique à leur égard.
Nous ne savons rien d'elles, mais nous en savons assez de nous pour définir, de notre point de vue, la première exigence de cette Ethique c'est le respect de notre raison et de notre liberté, et par conséquent le refus du contact.
Si une pensée supérieure à la nôtre connaît notre existence et nous observe, nous ne pourrons jamais savoir ce qu'elle est.
Et si elle nous respecte, elle doit nous laisser à notre solitude jusqu'à ce que notre propre métamorphose nous rende capables d'en sortir nous-mêmes, sans l'épreuve de la dépendance.
Toujours en considérant la chose de notre point de vue, le plus que peut faire cette pensée est de stimuler la nôtre en lui posant des problèmes "un peu supérieurs à nos possibilités", comme Cole en pose à son singe.
Après vingt ans d'études et de discussions, nous croyons que c'est précisément ce qu'elle fait. Et nous sommes frappés de constater que ce qui, au départ, nous apparaissait comme un défi à la raison, se révèle, à l'examen, conforme à la raison.
Si personne n'avait observé de soucoupes volantes, nous devrions maintenant nous demander pourquoi. Nous serions obligés d'imaginer un univers très différent de celui que la science nous découvre peu à peu, un univers au sein duquel l'homme serait un incompréhensible miracle, une "insondable facétie", selon les mots de l'astrophysicien Schkovski.
L'homme est-il cette insondable facétie? Ou bien occupe-t-il sa petite place, à la fois banale et sans prix, dans un coin de l'ordre des choses? Peut-être saurons-nous répondre à cette question quand nous saurons ce que sont les soucoupes volantes.
Nemrod, qu'est ce que la cognition ? En schématisant, on peut dire que c'est construire/transformer de la connaissance. C'est plus clair ?
"
Jamais un chien, même dans un siècle à venir, ne comprendra la relativité d'Einstein, parce qu'il manque au cerveau du chien la structure requise "
Cette formule synthétise à merveille la pensée d'Aimé Michel...
Par contre pour défendre l'hypothèse de quelque chose d'exotique et mystérieux là on est capable d'aller 100 fois plus loin que les sceptiques
Certains d'entre eux est plus juste, non ? Et il ne s'agit pas des plus " orthodoxes ", hein ? Quoi qu'il en soit, je ne crois pas privilégier telle hypothèse sur une autre. Certes, je ne ne nie pas entretenir quelques convictions, mais je n'ai pas de certitudes.
Comme Vallée, notamment, je pense que l'hypothèse extra-terrestre permet à quelques esprits " schématiques " de plaquer une explication simpliste sur des phénomènes complexes. Et, tout comme lui, je serais déçu si il ne s'agissait " que " de cela !
As-tu une idée précise, personnellement? J'en suis curieux. Ici la question est : si invasion via sondes les verrait-on?
il y a schématiquement:
1- oui vraissemblablement (Venom, Marscassite(?))
2- non pas forcément (Marius, Buckwild, moi, jere__)
3- sans avis (NEMROD34, les autres(?))
Je l'ignore ! Thomas Kuhn écrivait "
que ce soit dans les laboratoires d'autrefois ou ceux d'aujourd'hui, la tâche ( des scientifiques ) semble être de forcer la nature à entrer dans les boîtes préformées et rigides que fournit le paradigme. Il ne leur vient pas à l'idée que l'un des buts de la science est de s'intéresser à de nouveaux phénomènes; en fait, ceux qui correspondent mal à une des boîtes habituelles passent même souvent inaperçus "