: http://bourdais.blogspot.fr/2013/11/les-documents-majestic-12-et-le-nouveau.html
En gros, les documents MJ12 ne sont pas si faux que ça pour "être de simples canulars".
Bourdais a écrit:Venons-en maintenant au livre de Jean-Gabriel Greslé de 2013, 1942-1954. La genèse d’un secret d’état. Disons tout de suite qu’il y développe une thèse pour le moins hardie : les Américains auraient trouvé, dès 1942, de l’uranium 235 et du plutonium dans une soucoupe écrasée, qui leur auraient servi pour fabriquer leurs bombes atomiques de 1945, et même peut-être pour construire la première pile atomique en 1942, à Chicago !
Comment arrive-t-il à une aussi étonnante hypothèse ?
Son point de départ est la mystérieuse attaque aérienne de Los Angeles dans la nuit du 25 février 1942. Cet incident est connu et ne fait pas de doute. Un ou plusieurs appareils inconnus étaient restés longuement en point fixe au-dessus de la ville et l’on avait tenté de les abattre sans succès. Avec le recul, l’hypothèse d’une première grande manifestation d’ovni paraît plausible aujourd’hui. Le général Marshall, chef d’Etat-Major, avait fait dès le lendemain un rapport sur l’incident au président Roosevelt, qui a été déclassifié en 1972, comme le rappelle Greslé dès le début de son livre.
Mais il n’est pas encore question de crash d’ovni dans ce mémo. L’hypothèse d’un double crash d’ovnis, qui auraient eu lieu lors de cette attaque, prend forme avec de nouveaux documents « Majestic 12 ». Il s’agit d’abord d’un mémo top secret signé de Roosevelt, adressé à Marshall et daté du 27 février, également reproduit par Greslé (pages 17 et 18). Roosevelt, répondant à Marshall, y évoque brièvement des « secrets atomiques découverts en étudiant des engins célestes ». Soulignons que c’est écrit deux jours seulement après le après le « raid » de Los Angeles. Puis Greslé cite un autre document (pages 20 et 21) qui est une véritable bombe. C’est un nouveau mémorandum du général Marshall au président, daté du 25 mars, qui révèle que les militaires ont trouvé deux aéronefs, manifestement d’origine non-humaine, l’un par la Marine au large de la côte californienne, et l’autre par des commandos aériens dans les montagnes de San Bernardino, à l’est de Los Angeles ! Roosevelt y faisait-il déjà allusion dans son mémo du 27 février ? Et comment le savait-il ? Ou parlait-il d’autre chose ? Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce n’est pas clair.
Ces « révélations sont sensationnelles, mais les documents sont-ils authentiques ? Quelques ufologues les ont reçus, anonymement, par la poste en provenance de Sacramento en Californie, comme le raconte Ryan Wood dans son livre de 2005 Magic Eyes Only (p. 2).
Ce sont de mauvaises photocopies, et il y a lieu, naturellement, d’évaluer avec prudence leur crédibilité… Pour sa part, Greslé pense que la Marine avait récupéré son ovni en 1941. Il révèle la source vers la fin du livre (page 278) : c’est le mystérieux « Dr Michael Wolf » qui l’a dit. Alors là, ma prudence ne fait que s’amplifier car il se trouve que je le connais un peu, si c’est bien lui dont il s’agit. Il avait fait des révélations sensationnelles dans les années 90, racontant qu’il avait deux doctorats (Stan Friedman, très sceptique comme beaucoup d’autres ufologues, a vérifié qu’il n’y en a aucune trace), et qu’il avait travaillé avec les « Gris » dans la base mythique de Dulce (dont personne n’a apporté une preuve qu’elle existe) ! J’avoue que j’avais voulu croire un peu à ce témoin, sur la base de témoignages privés (je lui avais même téléphoné chez lui à Hartford, où il était gravement malade. Il est maintenant décédé), mais j’ai changé d’avis : voilà une source fragile s’il en est… Voir mon livre de 2010, chapitre VII (page 309 pour le « Dr » Wolf).
Ces « révélations» sur des crashs d’avant 1947 sont très fragiles, on le voit, mais on peut en citer d’autres qui le sont un peu moins, que l’on trouvera aussi dans mon livre. Peut-être un crash au Texas, à Cape Girardeau en 1941, et peut-être un autre, pendant la guerre en Grande-Bretagne (date et lieu non précisés) qu’auraient récupéré les Américains, selon la journaliste Dorothy Killgalen. Si cela est vrai, les Américains auraient eu deux ovnis dès les années de guerre, ce qui expliquerait d’ailleurs leur réaction rapide à Roswell en 1947. Justement, venons-en maintenant à l’affaire de Roswell, autre étape du scénario de Greslé.
On l’a vu, le document cité plus haut « Mission Assessment » de septembre 1947 donne la liste des matériaux trouvés en 1947 dans l’engin censé avoir été récupéré à Oscura Peak, (tout près de « Trinity Site », lieu de l’essai de la première bombe atomique deux ans plus tôt). On y aurait trouvé notamment de l’uranium 235 et du plutonium (en poudre). Curieuse « coïncidence atomique ». Faut-il le rappeler, ce sont des matériaux très radioactifs et dangereux à manipuler ! Si vous respirez une petite dose de plutonium, vous êtes assuré d’une mort rapide par cancer du poumon. Espérons que les équipes de récupération de l’épave étaient bien protégées… Sans oublier le risque de « criticité », c’est-à-dire de masse critique à partir de laquelle on risque une réaction en chaine explosive : cinq kilos pour le plutonium, quinze kilos pour l’uranium 235. En 1945, ces charges étaient transportées par moitiés dans des caissons en plomb.
Un autre document me tracasse. Le mémorandum du CIG (Central Intelligence Group), daté du 19 septembre et signé de l’amiral Hillenkoetter (bientôt directeur de la CIA), révèle un troisième site de crash, découvert le 5 juillet dans la région, à 30 miles à l’est d’Alamogordo. Cela fait vraiment beaucoup de crashes, en plus de Roswell, presque à la même date et dans la même région ! Cette multiplication des crashs, cités dans des documents reçus anonymement par des ufologues, pourrait-elle être un écran de fumée pour mettre en doute le vrai crash, celui de Roswell ?
Et voici maintenant la théorie étonnante de Greslé. Il suppose qu’on avait trouvé aussi de l’uranium et du plutonium dans les ovnis de 1941 et 1942, et qu’ils avaient servi pour faire les bombes de 1945, et même la pile atomique de 1942 à Chicago !!
Quelle est la vraisemblance d’un tel scénario ? En premier lieu, les Américains avaient beaucoup d’uranium. Il y avait notamment un stock important de minerai d’uranium entreposé dans le port de New York, à Staten Island, provenant du Congo et livré par les Belges au début de la guerre. Il y avait largement de quoi construire la première pile atomique d’Enrico Fermi en 1942 à Chicago, puis de lancer, à partir de 1943, l’usine de séparation isotopique de l’uranium (pour extraire l’U 235) à Oak Ridge dans le Tennessee, et produire du plutonium dans les huit réacteurs atomiques construits à Hanford, près de Seattle.
Cette histoire est bien connue aujourd’hui. Pas besoin, pour tout cela, de trouver de l’uranium 235 et du plutonium en 1942 dans une soucoupe ! En outre, s’il est vrai que le plutonium était un élément artificiel, il était déjà bien connu des physiciens : son caractère fissile (élément 94) avait été découvert en Grande-Bretagne, et il avait été isolé par Glenn Seaborg dès le début de 1941 à l’université de Californie.
Tout cela étant dit, je maintiens mon opinion, d’accord malgré tout, sur ce point, avec Jean-Gabriel Greslé : ces documents « Majestic 12 » sont bien trop complexes pour être de simples canulars, et leurs auteurs sont des connaisseurs « de l’intérieur ». Je crois qu’ils poursuivent peut-être un objectif de divulgation progressive, tout en laissant des gages aux sceptiques, avec des erreurs délibérées, pour pouvoir les mettre en doute. Ryan Wood cite, à la fin de son livre Magic Eyes Only (page 252), une lettre de « Cantwheel » adressée à Tim Cooper en 1996, peu de temps avant sa mort, qui se terminait par ce conseil : « Ne croyez personne complètement ! » (« TRUST NO ONE COMPLETELY ! »).