Quelques précisions. Le "Suidas" ou "Souda" ("Suda" en anglais) est une encyclopédie du Xe s., ou une compilation byzantine. C'est une source littéraire importante.
Wikipédia a écrit:
La Souda (du grec ancien : Σοῦδα / Soûda) ou Suidas (Σουίδας / Souídas) est une encyclopédie grecque de la fin du xe siècle. C'est un ouvrage de référence, en particulier pour les citations, très souvent utilisé dans les travaux portant sur l'Antiquité. Le nom de l'ouvrage, la date de sa rédaction, l'identité de son ou de ses auteurs ont posé de délicats problèmes aux chercheurs.
La Souda est un dictionnaire qui présente à la fois des définitions de mots rares en grec ancien et des formes grammaticales complexes. C'est aussi une encyclopédie commentant des personnes, des lieux ou des institutions. Les sources qu'elle utilise sont souvent bibliques ou antiques et elle ne fournit que peu de renseignements sur l'époque byzantine. Ignoré au Moyen Âge, l'ouvrage a été produit dans l'empire byzantin. Il a été publié pour la première fois en Europe en 1499, à Milan, sous le nom de Lexicon græcum.
Cet ouvrage considérable, d'un million et demi de mots, comprend 31 342 entrées portant sur des données historiques, biographiques et lexicographiques. Les entrées sont classées selon un système à la fois alphabétique et phonétique : les diphtongues sont classées après les voyelles simples. Ainsi αι / ai est classé après ε epsilon. Et ω oméga vient après ο omicron, ce qui ne correspond pas au classement alphabétique grec classique.
C'est une compilation de compilations, qui utilise des biographies, bibliographies et autres renseignements sur des écrivains païens et chrétiens, dont la plupart ont disparu : les scholies sur Aristophane, Sophocle et Thucydide ont beaucoup servi. Les notices biographiques proviennent souvent, de l'aveu de l'auteur, de l'Onomatologion ou du Pinax d'Hésychius de Milet (vie siècle). Parmi les autres sources abondamment utilisées figurent les Excerpta de Constantin Porphyrogénète, la Chronique de Georges le Moine, les biographies de Diogène Laërce, les travaux d'Athénée et de Philostrate.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Souda
La dernière édition savante est l'édition de 1938 (Adler).
https://philiki.org/2015/10/09/la-souda-une-encyclopedie-grecque-du-moyen-age/
Quant à cette histoire d'âne, je n'en trouve rien sur l'entrée "Ammonios" (p. 78) qui se résume à deux lignes dans google books:
https://books.google.gr/books?id=A5YCAAAAQAAJ&pg=PA1#v=onepage&q&f=false
Dans la "Suda on line", je trouve l'article sur Ammonios en tête:
http://www.cs.uky.edu/~raphael/sol/sol-cgi-bin/search.cgi
Suda on line a écrit:Headword: Ἀμμώνιος
Adler number: alpha,1640
Translated headword: Ammonios, Ammonius
Vetting Status: high
Translation:
Philosopher; of Alexandria; nicknamed Saccas.[1] He was of Christian parents, but became a [pagan] Greek, as Porphyry says.[2]
Greek Original:
Ἀμμώνιος, φιλόσοφος, Ἀλεξανδρεύς, ὁ ἐπικληθεὶς Σακκᾶς. οὗτος ἀπὸ Χριστιανῶν γέγονεν Ἕλλην, ὥς φησι Πορφύριος.
Notes:
RE Ammonios(14); NP Ammonios(3); OCD(4) Ammonius(2) Saccas.
Ammonios Sakkas taught the most prominent Neoplatonists, both pagan (Plotinus) and Christian (Origen: see the beginning of omega 182). See web address 1 below (Internet Encyclopedia of Philosophy), and cf. sigma 33 (end).
[1] 'The nickname Saccas (sack-carrier? wearer of sackcloth?) would seem to imply a humble origin, though other interpretations have been proposed' (OCD).
[2] Porphyry, Against the Christians fr. 39 Harnack (Eusebius, Ecclesiastical History 6.9.7).
En revanche, j'ai trouvé cette entrée sur "Ammonianus":
Suda on line a écrit:Headword: Ἀμμωνιανός
Adler number: alpha,1639
Translated headword: Ammonianos, Ammonianus
Vetting Status: high
Translation:
Grammarian, honoured by his association with Syrianus[1] and also by their innate similarity in character and physique -- in Homer's words, 'in appearance and stature and nature most similar';[2] for each of them was physically handsome and large. Furthermore, their health and strength did not in any way fall short of their other natural gifts, either in whole or in any part. Their souls were eager for the best in the same way. But Syrianus was the more pious, and a genuine philosopher; the other was devoted to the art that is founded on the exegesis of poets and the correction of Greek diction. It was this Ammonianus who happened to acquire an ass as an audience for his wisdom.[3]
Greek Original:
Ἀμμωνιανός, γραμματικός, κοσμούμενος τῇ συγγενείᾳ Συριανοῦ καὶ ἅμα τῇ συμφύτῳ ὁμοιότητι τῶν τε ἠθῶν καὶ τοῦ σώματος, κατὰ τὸν Ὅμηρον εἶδός τε μέγεθός τε φυήν τ' ἄγχιστα ἐῴκει. τό τε γὰρ σῶμα καλός τε καὶ μέγας ἦν ἑκάτερος. καὶ ἔτι προσῆν ὑγεία καὶ ἰσχὺς οὐδὲν ἀποδέουσα τῆς ἄλλης εὐφυί̈ας τοῦ τε ὅλου καὶ τῶν μερῶν: ἥ τε ψυχὴ ἔρρωτο πρὸς τὸ βέλτιστον αὐτοῖς τὸ ὁμοιότροπον. ἀλλ' ὁ μὲν θεοφιλέστερος ἦν ὁ Συριανὸς καὶ τῷ ὄντι φιλόσοφος: ὁ δὲ ἠγάπα τὴν ἐπὶ ποιητῶν ἐξηγήσει καὶ διορθώσει τῆς Ἑλληνικῆς λέξεως καθημένην τέχνην. οὗτος ἦν Ἀμμωνιανός, ᾧ κεκτῆσθαι συμβέβηκεν ὄνον σοφίας ἀκροατήν.
Notes:
Damascius Life of Isidore fr. 111 Zintzen. See RE Ammonianos(2); PLRE II Ammonianus.
[1] [sigma 1662] Syrianus.
[2] Homer, Iliad 2.58.
[4] cf. [omicron 391] ὄνος λύρας . Photius, Bibliotheca cod. 242, 339a: "it was this Ammonianus who happened to acquire an ass which (they say) often neglected its feed to listen to lessons on poetry, even when it had deliberately been made to go hungry; such was the extent of the ass's desire for knowledge about poetry."
Et donc:https://en.wikipedia.org/wiki/Ammonianus
Wikipédia a écrit:Ammonianus (Greek: Ὰμμωνιανός) was an ancient Greek grammarian, who lived in the 5th century CE. He was a relation and a friend of the philosopher Syrianus, and devoted his attention to the study of the Greek poets. It is recorded of him that he had an ass, which became so fond of poetry from listening to its master, that it neglected its food.
Et on trouve dans la Souda, à l'entrée "Onos lyras" que ça renvoie à un proverbe de Ménandre, celui qui chantait les louanges des champions olympiques:
Suda on line a écrit:Headword: Ὄνος λύρας
Adler number: omicron,391
Translated headword: a donkey to a lyre
Vetting Status: high
Translation:
Menander in Psophodees [uses the phrase].[1] The complete proverb [is]: "a donkey was listening to a lyre and a pig to a trumpet". It is said of those who do not express agreement or praise.
Ammonianus the grammarian happened to acquire a donkey as an audience for his wisdom. Look under 'Ammonianus'.[2]
Greek Original:
Ὄνος λύρας: Μένανδρος Ψοφοδεεῖ. ἡ δ' ὅλη παροιμία, ὄνος λύρας ἤκουε καὶ σάλπιγγος ὗς. λέγεται ἐπὶ τῶν μὴ συγκατατιθεμένων μηδὲ ἐπαινούντων. ὅτι Ἀμμωνιανῷ τῷ γραμματικῷ συμβέβηκεν ὄνον κεκτῆσθαι, σοφίας ἀκροατήν. καὶ ζήτει ἐν τῷ Ἀμμωνιανός.
Notes:
The first paragraph of this entry is also in Photius (omicron355 Theodoridis, with other references there).
[1] Menander fr. 527 Kock (418 K.-A.); cf. Misoumenos 295 Sandbach = 696 Arnott. Compare omicron 384, omicron 385, and see generally Tosi [cited under alpha 378] no.1934.
[2] [alpha 1639] Ammonianus.
Donc on raconte bien l'histoire d'un âne acquis par le grammairien Ammonianus qui adorait écouter son maître sur la poésie qu'il en négligeait de manger (dixit Wikipédia, ou plutôt Damascios, ap. Phot. p. 339, a., édition Bekker dans William Smith. "A Dictionary of Greek and Roman biography and mythology". London. John Murray: printed by Spottiswoode and Co., New-Street Square and Parliament Street, 1844).
Damascios, dernier représentant de l'Académie de Platon a ajouté ou précisé cette histoire d'âne qui négligeait de se nourrir en écoutant Ammonianus déclamait de la poésie (Homère e.g.).
Wikipédia a écrit:Damascios le Diadoque (né à Damas en 458, mort en 533, probablement en Syrie) est un philosophe néoplatonicien.
Disciple d'Isidore de Gaza et de Marinos de Néapolis, maître de Simplicios de Cilicie et d'Olympiodore le Jeune, il est l'un des derniers défenseurs du paganisme dans l'Antiquité tardive. Son nom indique son origine : Damas, sans qu'on sache s'il s'agit de son nom de naissance ou d'un surnom donné à l'âge adulte. Il fut le dernier diadoque (διάδοχος, successeur [de Platon]) ou scolarque (recteur) de l'Académie d'Athènes, fondée par Platon en 387 av. J.-C., ou de l'école néoplatonicienne d'Athènes, fondée par Plutarque d'Athènes vers 400, illustrée par Proclos à partir de 438. L'école philosophique d'Athènes fut fermée sur ordre de Justinien Ier en 529. La forme latine de son nom est Damascius.
Quant à savoir si cette histoire d'âne est vraie, alors là...
Toujours est-il que "Onas lyras" "Âne à la lyre" renvoie à un proverbe connu des grecs et des romains et repris au Moyen Âge et à la Renaissance:
https://books.openedition.org/pumi/4568
Bestiaire chrétien a écrit:Tout d'abord de nombreuses fables sont réutilisées sans grande modification. On conserve seulement la trame du récit et cette simplification permet de concentrer l'histoire en une formule quasi proverbiale, dont la force imagée se suffit à elle-même. Il n'est pas nécessaire de renforcer ou compléter la leçon satirique ou morale qui s'y trouvait déjà. Par leur forme et leur intention, ces apologues s'assimilent donc aisément à la dialectique chrétienne. « L'âne à la lyre » offre un bon exemple de cette récupération d'une fable de Phèdre :
« L'âne, voyant une lyre abandonnée par terre dans une prairie, s'approcha et essaya les cordes avec son sabot, elles résonnèrent dès qu'il les toucha : "Joli instrument parbleu, mais c'est mal tombé, dit l'âne, car je ne sais pas en jouer. Si quelqu'un de plus savant l'avait trouvé, il eût charmé les oreilles par de divines mélodies". »
Cette fable se fait l'écho d'un proverbe grec (onos lyras), appliqué à une personne incompétente et maladroite, que les Romains employaient aussi. Les éléments du récit sont présents dans la fable de Midas mais sous un agencement différent. Pour avoir préféré la rustique flûte de Pan au son harmonieux de la lyre d'Apollon, il reçut des oreilles d'âne en châtiment de son « esprit épais et (de) sa sottise ».
Boèce (470-525) reprend, sous une forme très concise, l'image de l'âne de Phèdre, incapable de jouer de l'instrument, et la met dans la bouche de dame Philosophie qui interpelle ainsi celui qui ne l'a pas comprise : « Entends-tu mes paroles, ou es-tu comme l'âne devant la lyre ? » L'expression connaît alors un grand succès qui ne se dément pas pendant tout le Moyen Âge et jusqu'à la Renaissance, et on en attribue la paternité entière à Boèce par qui la médiation s'est effectuée.