Je recopie l'article en cas :
http://fsp-faq.ifrance.com/usenet-sci-faq/occam-fr.html
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updated 23-July 1997 by Sugihara Hiroshi
original by Phil Gibbs 17-September 1996
traduction lgmdmdlsr nov 2000
Qu'est-ce que le rasoir d'Occam?
Le rasoir d'Occam (ou Ockham) est un principe attribué au moine franciscain et penseur du XIVè siècle William d'Occam. Occam était le village du comté de Surrey où il était né.
Le principe énonce: "les entités ne devraient pas être multipliées sans nécessité." quelquefois on le cite sous la forme d'un de ses énoncés originaux en latin pour lui donner un air authentique.
"Pluralitas non est ponenda sine neccesitate"
"Frustra fit per plura quod potest fieri per pauciora"
"Entia non sunt multiplicanda praeter necessitatem"
En fait seule les deux premiers de ces énoncés apparaissent dans ce qui nous est resté de ses travaux, et le troisième a été écrit par un élève ultérieur. William utilisa le principe pour justifier beaucoup de conclusions, en particulier la proposition selon laquelle "l'existence de Dieu ne peut être déduite par la raison seule". Cette proposition ne l'a pas rendu très populaire auprès du Pape.
Beaucoup de savants ont adopté ou réinventé le Rasoir d'Occam, comme dans "l'identité des observables" de Leibniz, et Isaac Newton énonça la règle: "Nous n'avons à accepter pas plus de causes des choses naturelles que celles qui sont à la fois vraies et suffisantes pour expliquer ces choses."
L'énoncé le plus utile du principe pour les savants est,
"quand on a deux théories en compétition qui permettent de prédire exactement les mêmes choses, celle qui est la plus simple est la meilleure."
En physique on utilise le rasoir pour se débarrasser de concepts métaphysiques. L'exemple canonique est la théorie de la relativité restreinte d'Einstein comparée avec la théorie de Lorentz que les règles se contractent et que les horloges ralentissent lors d'un mouvement dans l'éther. Les équations d'Einstein de transformation de l'espace-temps sont les mêmes que les équations de Lorentz transformant les règles et les horloges, mais Einstein et Poincarré ont reconnu que l'éther ne pouvait être détecté d'après les équations de Maxwell et Lorentz. D'après le rasoir d'Occam l'éther devait être éliminé.
Le principe a aussi été utilisé pour justifier l'incertitude en mécanique quantique. Heisenberg a déduit son principe d'incertitude de la nature quantique de la lumière et de l'effet de la mesure.
Stephen Hawking explique dans Une brève histoire du temps:
"Nous pouvons toujours imaginer qu'il existe une série de lois qui détermine complètement les événements pour un être surnaturel, qui pourrait observer l'état actuel de notre univers sans le perturber. Toutefois, de tels modèles de l'univers ne nous intéressent pas nous autres mortels. Il semble préférable d'utiliser le principe connu sous le nom de Rasoir d'Occam et éliminer toutes les effets de la théorie qui ne peuvent être observés. "
Mais l'incertitude et la non-existence de l'éther ne peuvent être déduites du seul rasoir d'Occam. Ce dernier peut trancher entre deux théories qui engendrent les mêmes prédictions, mais ne peut rendre caduques d'autres théories qui conduisent à des prédictions différentes. Les preuves empiriques sont aussi nécessaires et Occam lui-même plaidait pour l'empirisme, et non contre lui.
Ernst Mach soutint une version du rasoir d'Occam qu'il appela le principe de l'économie, qui s'énonce: "Les savants doivent utiliser les concepts les plus simples pour parvenir à leurs résultats et exclure tout ce qui ne peut être perçu par les sens." Menée jusqu'à sa conclusion logique, cette philosophie devient le positivisme; la conviction qu'il n'y a pas de différence entre ce qui existe mais n'est pas observable et ce qui n'existe pas du tout. Mach a influencé Einstein quand il clama que l'espace et le temps n'étaient pas absolu, mais il appliqua aussi le positivisme aux molécules. Mach et ses successeurs ont annoncé que les molécules étaient des concepts métaphysiques parce qu'elles étaient trop petites pour être détectées directement. Ceci malgré le succès qu'avait la théorie moléculaire pour expliquer les réactions chimiques et la thermodynamique. Il est ironique que bien qu'utilisant le principe d'économie pour se débarrasser du concept d'éther et d'un référentiel absolu au repos, Einstein publia presque en même temps un article sur le mouvement brownien qui confirmait la réalité des molécules et donc opposait un argument contre l'utilisation du positivisme. La morale de cette histoire est que le rasoir d'Occam ne devrait pas être maniée aveuglément. Comme Einstein le fit dans ses notes autobiographiques:
"Ceci est un exemple intéressant du fait que même des élèves ayant l'esprit audacieux et un instinct affiné peuvent être bloqués dans l'interprétation de faits par des barrières philosophiques."
Le rasoir d'Occam est souvent énoncé dans des formes plus fortes qu'Occam voulait, comme dans les énoncés suivants...
"Si on a deux théories qui expliquent toutes deux les faits observés alors on devrait utiliser la plus simple jusqu'à ce que d'autre preuves soient découvertes."
"L'explication la plus simple pour un phénomène est vraisemblablement plus juste que des explications plus compliquées."
"Si vous avez deux solutions à un problème qui semblent de même valeur, prenez la plus simple."
"L'explication nécessitant le moins d'hypothèses possibles est vraisemblablement plus correcte."
... ou, dans la seule forme ou il garde sa signification propre...
"Gardez les choses simples!"
Veuillez noter comment le principe a gagné en force dans ces énoncés, qu'on devrait plus correctement appeler la loi de la parcimonie, ou la loi de la simplicité. Pour commencer on a utilisé le rasoir d'Occam pour séparer des théories qui prédisaient les mêmes résultats pour toute expérience. Maintenant on est en train d'essayer de choisir entre des théories qui engendrent des prédictions différentes. Ce n'est pas ce qu'Occam voulait faire. Ne devrait-on pas plutôt tester ces prédictions? Bien sûr on pourrait en fait, mais supposons qu'on en est à une étape antérieure et qu'on n'est pas encore prêt à réaliser les expériences. On est juste en train de chercher des pistes de réflexion pour développer une théorie.
Ce principe remonte à aussi loin qu'au temps d'Aristote qui écrivait " La nature utilise le chemin le plus court possible." Aristote alla trop loin en croyant que les expériences et l'observation n'étaient pas nécessaires. Le principe de simplicité fonctionne comme une règle "avec les mains" heuristique, mais certaines personnes le citent comme un axiome de la physique. Ce qu'il n'est pas. Il fonctionne bien en philosophie ou en physique des particules, mais moins souvent en cosmologie ou en psychologie, dans lesquelles les choses deviennent plus compliquées qu'on ne pouvait s'y attendre quand on les approfondit. Peut-être qu'une citation de Shakespeare pourrait être plus appropriée que le rasoir d'Occam: "Il y a plus de choses dans le paradis et la Terre, Horatio, que celles auxquelles on rêve dans notre philosophie.".
La simplicité st un concept subjectif et l'univers n'a pas toujours les mêmes idées que nous sur la simplicité. Les théoriciens qui réussissent parlent souvent de symétrie et de beauté autant que de simplicité. En 1939 Dirac écrivait,
"Le chercheur, dans son effort pour exprimer les lois fondamentales de la Nature en langage mathématique devrait en priorité tenter d'obtenir la beauté mathématique. Il arrive souvent que les exigences requises pour la simplicité et la beauté soient les mêmes, mais quand elles sont en désaccord c'est la dernière qui doit être prioritaire."
La loi de parcimonie n'est pas un substitut de la perspicacité, la logique et la méthode scientifique. On ne devrait jamais compter sur elle pour établir ou défendre une conclusion. Comme gage d'exactitude seules la cohérence logique et les preuves empiriques sont absolues. Dirac a eu beaucoup de réussite avec sa méthode. Il a construit l'équation relativiste du champ pour l'électron et l'a utilisée pour prédire l'existence du positron. Mais il ne suggérait pas que la physique devait être basée uniquement sur la beauté mathématique. Il a pleinement compris le besoin de vérifications expérimentales.
Le mot de la fin échoit à Einstein, lui-même un maître des citations courtes. Il avertit,
"On devrait tout rendre aussi simple que possible, mais pas plus."
Références:
W. M. Thorburn, "Occam's razor," Mind, 24, pp. 287-288, 1915.
W. M. Thorburn, "The Myth of Occam's razor," Mind, 27, pp. 345-353, 1918.
Stephen Hawking, A Brief History of Time.
Albert Einstein, Autobiographical notes
Isaac Newton, Principia: The system of the world