Les lumières de HessdalenDes scientifiques cherchent une explication de haute technologie pour ces lumières fantômes en Norvège. Mais la véritable cause ne serait-elle pas beaucoup plus simple?Skeptoid n°270
9 août 2011
Revenons en 1981, quand les gens dans la vallée norvégienne de Hessdalen ont commencé à voir quelque chose d'étrange dans leur ciel nocturne. Des lumières colorées qui flottaient en silence apparaissaient parfois au-dessus de la vallée. Les observateurs curieux ont découvert qu'elles étaient plus facilement observables d'une zone en pente à l'extrémité nord de la vallée, en regardant vers le sud, et en quelques années les chercheurs d'ovnis a commencé a converger vers Hessdalen. Et depuis, il y a eu là l'une des plus longues et des plus techniques de toutes les enquêtes sur les ovnis.
Certains les appellent des ovnis, certains les appellent des lumières fantômes, certains les appellent Earthlights [NdT : théorie des phénomènes lumineux d'origine géophysique, cf. Persinger]. Aucun des chercheurs n'a une très bonne idée de ce qu'elles sont, mais les habitants de Hessdalen ne semblent pas trop inquiets. Leur petite vallée est tranquille, bien loin des sentiers battus, et seulement quelques centaines de personnes vivent dans son village dispersé. En 1983, le Dr Erling Strand, un chercheur d'ovnis, a lancé le projet Hessdalen comme une sorte de structure centrale pour toutes les informations recueillies par les ufologues et d'autres chercheurs. Strand était convaincu qu'une branche inconnue de la physique était responsable des lumières étranges, et il a encouragé autant de scientifiques que possible à se joindre à son projet.
En 1998, le Projet Hessdalen a construit une station de mesure automatisée sur la zone en pente populaire, avec une vue dégagée du ciel vers le sud de la vallée. Elle a été truffée d'une variété étonnante de matériel technique, qui comprenait des caméras optiques, des magnétomètres, de l'équipement météo et des instruments de mesure de rayonnement électromagnétique basse fréquence. Curieusement, la station comprend également un générateur de nombres aléatoires faisant partie du Global Consciousness Project, qui vise à prouver que la conscience humaine collective prédit des événements importants en altérant la production de générateurs de nombres aléatoires. Vraisemblablement, c'est pour tester si l'apparition des lumières de Hessdalen est une sorte d'événement psychique.
Ce que la station automatisée a trouvé est que les lumières apparaissent habituellement dans le ciel entre 21 heures et 1 heure, et plus souvent en hiver. De nombreuses photos ont été envoyées à leur serveur web, et elles peuvent être vues sur hessdalen.org. Quand elles apparaissent, chacune des lumières maintiennent une température de couleur constante, et son spectre reste cohérent.
Les chercheurs ont creusé le sujet pour essayer de mettre le doigt sur cette nouvelle branche insaisissable de la physique. Un des associés Dr Strand, l'astrophysicien et radioastronome Dr. Massimo Teodorani, a écrit à propos des nombreuses théories, qu'ils ont explorées:
Principalement les causes possibles suivantes ont été envisagées: l'activité ionosphérique, l'activité solaire, les rayons cosmiques, les monopôles magnétiques, des mini-trous noirs, la matière de Rydberg, les nanoparticules chauffée, la piézoélectricité, [et] les fluctuations quantiques du vide. Pour aucune de ces causes, sauf pour certains aspects de la piézoélectricité, il n'a été possible de trouver une preuve de succès.
Teodorani était lui-même favorable à une explication assez pittoresque. Sa théorie est un peu longue, mais je vais la paraphraser. Il croit que l'eau s'infiltre dans les fissures de quartz dans la vallée, et quand il gèle, elle exerce une pression sur le quartz, provoquant un effet piézoélectrique qui produit un courant électrique. Il saute alors à la présence supposée d'une boule de plasma stationnaire, probablement allumée par le courant piézoélectrique, et l'équilibre de cette théorie complexe implique les caractéristiques du plasma. Il se lie avec la vapeur d'eau, les aérosols et les spores de moisissures dans l'air. Il se maintient en équilibre en raison d'interactions complexes, et conserve sa forme en raison d'un présumée «manteau frais» d'eau et d'ions.
Ce n'est pas une explication utile, elle est, au mieux, une hypothèse tirée par les cheveux. Elle enchaîne un certain nombre de suppositions marginales, dont peu sont plausibles ou ont jamais été observées. D'une part, ce que l'histoire entière de la Terre nous a enseigné, c'est que lorsque l'eau gèle à l'intérieur des fissures des roches, elle fissure la roche. Pas une fois il n'a été observé qu'elle quitte la roche intacte et transfère l'énergie en produisant du courant électrique qui crée des boules de plasma planantes. D'autre part, le quartz naturel présentent l'effet piézoélectrique, mais il y a très peu de quartz à Hessdalen. C'est presque uniquement du schiste et du grès. Alors que le schiste contient des particules de quartz, les schistes sont facilement fracturés par la glace ce qui les déchargerait de toute pression. Enfin, l'effet piézoélectrique dans certaines roches naturelles est réel, mais à peine détectable. A ma connaissance, il n'y a aucun exemple de telles micro-tensions minuscules provoquant la combustion de quelque chose, que ce soit dans les conditions froides et humides naturelles ou dans un environnement contrôlé de laboratoire.
Ce que Teodorani a entrepris n'est pas la recherche de la source des lumières qui ont été observés, mais plutôt un effort qui partait de l'hypothèse qu'un processus géophysique unique produisait des boules de lumière qui s'élevaient hors de terre. Il a ensuite formulé quelques hypothèses sur la façon dont il pensait que cela pourrait être accompli. Partir d'une explication, et travailler à l'envers pour essayer de la faire correspondre aux observations est l'opposé de la façon dont on doit procéder pour faire de la bonne science.
Même si l'hypothèse de Teodorani était vraie dans tous les détails, elle ne serait toujours pas une explication acceptable pour les observations de Hessdalen. Les gens vivent dans toute la vallée de Hessdalen, et aucune des observations n'a jamais décrit de lumières qui sortent du sol, ni même aucune lumières au dessus des témoins. En effet, rien n'a jamais été rapporté avoir été vu à l'intérieur de la vallée elle-même. Pour voir les lumières, vous devez monter sur la colline à l'extrémité nord de la vallée, et regardez vers le sud, vers les sommets dans l'axe de la vallée. L'hypothèse de Teodorani suppose que ses boules de plasma sont dans la vallée et flottent vers le haut, contrairement aux observations qui indiquent simplement que des lumières sont visibles au sud du point d'observation. Une meilleure explication de pourquoi aucune personne dans la vallée n'a jamais vu de boules planer autour d'elle, puis monter plus haut, est que les lumières ne sont pas là, et que leurs sources sont ailleurs.
Un conseil dont Teodorani et les autres chercheurs d'Hessdalen ne semblent pas avoir tenu compte est celui que leur a donné Marsha Adams de l'International Earthlight Alliance dans son article de 2006 intitulé
Artefacts de navigation aérienne à proximité de la vallée de Hessdalen, Norvège. Elle y déclare :
Les chercheurs qui étudient les Earthlights doivent être vigilants pour [détecter] les artefacts lumineux. En plus de phares de véhicules, lumières de maison et de ferme, étoiles, planètes, mirages, et autres phénomènes aérien naturels, une importante source d'artefacts lumineux est la présence d'aéronefs commerciaux et privés opérant à proximité des sites d'observation.
En utilisant de simples logiciels de navigation disponibles dans le commerce, elle a identifié un certain nombre de couloirs de circulation aériens, de stations VOR de navigation et d'aéroports locaux. Cela comprend un couloir que je trouve particulièrement intrigant : un couloir à 18° au nord du VOR de Tolga, conduisant directement à la vallée de Hessdalen, tout droit vers la station de mesure automatisée, exactement dans la direction où elle est orientée.
Comme cela a été précédemment mentionné dans d'autres épisodes de Skeptoid traitant des lumières fantômes, (les lumières de Marfa au Texas, les lumières Min Min en Australie, et les lumières de Brown Mountain en Caroline du Nord) il y a des phénomènes physiques connus qui peuvent rendre compte de ces rapports. Une meilleure façon d'enquêter sur le phénomène de Hessdalen serait au moins d'envisager les causes trouvée pour ces autres lumières. Les lumières Min Min ont été prouvées être une sorte d'effet de lentille thermique, où l'air chaud accumulé par la topographie du terrain se trouve en dessous de l'air plus froid de la nuit, et reflétait les lumières à l'horizon ; un effet que nous appelons un mirage supérieur. Cependant les lumières de Marfa et Brown Mountain se sont avéré être des méprises de lumières conventionnelles directement dans la direction de vision, sans doute déformées par des effets de lentille similaires. Ces irrégularités thermiques ont été trouvés dans les deux endroits. Dans le cas de Marfa, c'étaient des phares de voiture le long de deux autoroutes importantes. À Brown Mountain, c'étaient les phares d'une locomotive qui passait régulièrement sur la plaine au loin, ainsi que quelques autres lumières. La majorité des images capturées par la station de mesure automatisée de Hessdalen ont exactement l'aspect des phares d'atterrissage de forte puissance d'avions suivant le corridor au nord du VOR de Tolga.
L'aéroport de Trondheim (TRD) est au nord d'Oslo, en Norvège. Cette route passe presque directement au-dessus de Hessdalen. Quand les lumières de Hessdalen ont commencé à attirer l'attention en 1981, le service de charters passagers entre Oslo et Trondheim était à ses débuts, ayant commencé avec seulement quelques vols en 1976. En 1982, Trondheim avait ouvert son troisième terminal, et au moment où Scandinavian Airlines a acquis les transporteurs locaux en 2002, la route Oslo-Trondheim a été la plus empruntée de toute la Norvège. Trondheim est à environ 40 miles nautiques au nord de Hessdalen, et à cette distance l'utilisation des phares d'atterrissage est optionnelle. Certains pilotes les allument, certains ne le font pas, et les conditions météorologiques affectent souvent leur choix. Notez la conclusion par la station automatisée que les lumières apparaissent généralement entre 21 heures et 1 heure, quand il fait sombre et que le trafic aérien est actif, et plus souvent en hiver, quand plus de pilotes préfèrent utiliser les phares d'atterrissage pendant le vol au milieu des nuages. Que les lumières de Hessdalen soient de mystérieuses boules de plasma inexpliquées ou non, des lumières extrêmement brillantes correspondant aux photographies auraient été visibles dans le ciel très souvent, de nuit. Si vous êtes déjà resté près d'un grand aéroport et regardé dans l'axe d'une piste la nuit, vous avez vu le ciel parsemé d'étrange orbes lumineux stationnaires.
Au moment où le projet Hessdalen construisait sa station de mesure automatisée, et les chercheurs d'ovnis élaboraient fébrilement des hypothèses complexes sur le plasma, les nanoparticules, l'électromagnétisme et les mini-trous noirs, le ciel au-dessus a été remplie du plus grand nombre d'étranges orbes lumineuse stationnaires que Scandinavian Airlines avait jamais fait voler.
En aucune façon je ne suggère que les phares d'atterrissage sont la cause de toutes les observations Hessdalen, mais je n'ai trouvé aucune mention par aucun des scientifiques dirigeant le projet qu'un effort sérieux a été fait pour mettre en correspondance les survols d'aéronefs avec les observations et tenter de réfuter cette hypothèse particulière. En effet, quelques-unes des photographies des lumières automatiques montrent la station vers le bas au niveau du sol. La route 576 longe le fond de la vallée de Hessdalen, de sorte qu'il serait également nécessaire de tenter de corréler les observations du niveau du sol avec un trafic automobile, ce qui est exactement la manière dont ont été résolues les lumières de Marfa, au Texas. Les effets observés à Marfa et en Australie, de lointaines sources de lumière paraissant être proches, sous forme d'orbes planantes et ondulantes, peuvent être assez impressionnants et convaincants, et il serait présomptueux de la part des enquêteurs de Hessdalen de ne pas vérifier cette possibilité. Puisque nous avons une explication excellente et éprouvée pour des phénomènes lumineux identiques dans d'autres parties du monde, cette explication est peut-être plus vraisemblable que la liste de pistes de recherche exotiques de science-fiction répertoriées par le Dr Teodorani.
Étudiez avec un esprit ouvert. C'est dur, parce que cela signifie que vous devez être ouvert à la possibilité que vous n'avez pas, en fait, découvert de nouvelles branches de la physique.